Les maîtres de la vielle à roue : histoires et héritages en Auvergne

16 mars 2025

La vielle à roue en Auvergne : un art inscrit dans les traditions

La vielle à roue, appelée parfois "symbole sonore de l'Auvergne", trouve ses premières traces en France au Moyen Âge. Bien qu’elle soit utilisée dans d’autres régions, c’est en Auvergne, dès le XVIIe siècle, qu’elle est devenue un pilier de la musique populaire. Décriée par certains comme un "instrument des mendiants" dans les cours royales, elle a acquis ses lettres de noblesse grâce aux habitants des territoires montagneux, qui lui ont insufflé une dimension à la fois sacrée et festive.

La vielle est traditionnellement associée à des styles musicaux tels que les bourrées et les autres danses populaires auvergnates. Mais au-delà des danses, elle est aussi une porte-parole des récits locaux, des légendes et des émotions profondément liées à la culture paysanne.

Les premières figures de la vielle : des troubadours à l'essor populaire

Si on se tourne vers les anciens siècles, on trouve des traces d'artistes itinérants en Auvergne, ancêtres des viellistes d’aujourd’hui. Bien que leurs noms se perdent parfois dans les limbes de l’histoire, on sait qu’ils jouaient un rôle clé : celui de transmettre les traditions orales et d’accompagner la vie collective des villages.

Jean de l’Hôpital (XVIIIe siècle) : La vielle au service des nobles et des paysans

Jean de l’Hôpital est l’un des premiers musiciens de vielle répertoriés en Auvergne. Connu pour ses performances dans les cours seigneuriales tout autant que pour ses apparitions dans les fêtes rurales, il incarne cette double vie de l’instrument. Certes, la vielle est profondément liée à la paysannerie, mais elle a également servi à divertir les élites. Jean de l’Hôpital était reconnu pour sa capacité à improviser des mélodies sur la base de récits qui lui étaient racontés, une pratique qui témoignait de la richesse narrative des musiques de vielle.

Les viellistes auvergnats modernes qui ont fait l'histoire

Avec le déclin de certaines traditions paysannes au XIXe siècle, la vielle à roue aurait pu tomber dans l'oubli. Pourtant, en Auvergne, des musiciens passionnés ont œuvré pour faire perdurer cet art et pour le réinventer. Voici quelques-unes des figures contemporaines qui ont marqué sa renaissance.

Gaston Rivière : L'artisan de la revival de la vielle au XXe siècle

Né au début du XXe siècle dans le Puy-de-Dôme, Gaston Rivière est souvent vu comme l’un des pères fondateurs du renouveau de la vielle à roue. À une époque où les musiques traditionnelles perdaient du terrain face à la modernité, Rivière a consacré sa vie à réhabiliter cet instrument en organisant des festivités locales et en enregistrant des morceaux inspirés des répertoires anciens.

Il a également collaboré avec les premiers facteurs modernes de vielles à roue, aidant à améliorer la qualité de fabrication et à populariser de nouveaux modèles adaptés aux besoins des musiciens contemporains. Rivière, à travers ses spectacles et ses enseignements, a jeté les bases d’une transmission qui continue aujourd’hui de rayonner.

Jean Blanchard : Un vielliste entre tradition et modernité

Jean Blanchard (1949-2015) est une autre figure incontournable. Originaire de Lyon mais profondément enraciné dans la culture auvergnate, il a donné à la vielle à roue une nouvelle aura dans les années 1970 et 1980. Blanchard a su conjuguer le répertoire traditionnel avec des aspirations plus contemporaines, apportant des innovations musicales inspirées de la musique classique et folk moderne.

Il était également membre du groupe "La Bamboche", qui a joué un rôle clé dans la redécouverte des musiques folk régionales en France. Grâce à ses arrangements soignés et à son approche respectueuse des racines tout en étant audacieusement créative, Jean Blanchard a marqué l’histoire de la vielle comme peu d’autres avant lui [source].

L’héritage actuel : un instrument toujours vivant

À l’heure actuelle, la vielle à roue continue d’inspirer de nombreux musiciens, et l’Auvergne demeure un vivier de talents viellistes. Parmi eux, Aymeric Deblois et Julien Barbances incarnent cette jeunesse qui mêle un profond respect pour les racines musicales auvergnates et une volonté d'expérimenter en intégrant des influences modernes telles que le jazz ou les musiques électroniques.

  • Aymeric Deblois : Originaire du Massif central, ce jeune musicien a déjà séduit de nombreux auditeurs par ses arrangements novateurs. Jouant souvent dans des groupes de musique contemporaine, il explore les possibilités sonores de la vielle à roue avec des pédales d’effets et d’autres outils modernes.
  • Julien Barbances : Issu d’une famille de musiciens traditionnels, Barbances est également chanteur et conteur. Il emmène la vielle sur des terrains audacieux tout en continuant à jouer dans des fêtes de village, perpétuant ainsi un ancrage populaire et vivant de la tradition.

Un avenir prometteur pour la vielle en Auvergne

La vielle à roue, à travers les époques et les styles, a su séduire des musiciens passionnés et des publics variés. À l’heure où la tendance est au retour aux musiques acoustiques et aux sonorités organiques, l’instrument séduit de plus en plus en dehors des cercles d’amateurs traditionnels.

En Auvergne, des festivals comme le Festival des Hautes Terres, à Saint-Flour, célèbrent chaque année les musiques traditionnelles, mettant en lumière la vielle et ses interprètes. Les facteurs d’instruments continuent d’innover pour répondre aux attentes des musiciens modernes, assurant ainsi une pérennité et une adaptation de la vielle à roue aux modes actuels.

La vielle à roue n'est pas seulement un écho du passé ; elle est aussi une promesse d’avenir musical, une invitation à la re-découverte et à l’innovation. Et il semble certain que l’Auvergne ne cessera jamais de faire résonner cet instrument qui lui est si intimement lié.

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